Biologiste-chercheuse, Estelle Lacoursière était affectueusement surnommée « la sœur verte » par la population et « la petite sœur verte » par les élèves des deux derniers établissements trifluviens où elle a enseigné. Elle a formé, de 1969 à 1999, bien des personnes à la biologie végétale, au laboratoire de botanique de l'Université du Québec à Trois-Rivières, dont l'herbier, sous sa direction, a grandi presque de façon exponentielle. Cette religieuse pédagogue dans l'âme a consacré sa carrière à la vulgarisation des sciences de la nature, a conçu du matériel didactique (affiches, livres, etc.) d'avant-garde. Elle a mené de multiples luttes pour la sauvegarde de l'environnement et la préservation des espaces verts dans la région de la Mauricie, laquelle lui doit d'importants inventaires floristiques. La protection des secteurs boisés de l'Université du Québec à Trois-Rivières est en grande partie attribuable à ses efforts colossaux.
Mme Lacoursière vit le jour, en 1935, dans le village mauricien de Saint-Léon-le-Grand. Dès l'âge de 13 ans, elle reçut les enseignements des Ursulines, une congrégation à laquelle elle a appartenu une fois adulte. Elle a d'abord fréquenté le pensionnat et, ensuite, l'école normale, soit le lieu de formation d'institutrices. À 20 ans, elle choisit d'entrer en religion chez les Ursulines, qui était alors une communauté cloîtrée d'enseignantes.
Elle amorça sa carrière dans une école de rang multiprogramme, et ce, dans des conditions difficiles, où elle avait pour tâche, en plus d'enseigner, celle d'animer la Jeunesse étudiante catholique. Elle a ensuite enseigné au collège Marie-de-l'Incarnation de Trois-Rivières, au sein duquel elle s'est démarquée en organisant des ateliers ainsi que des classes vertes.
En 1964, année où l'État québécois a institué l'obligation d'être titulaire d'un diplôme universitaire pour enseigner au collège classique, Mme Lacoursière obtint un baccalauréat en biologie; elle avait alors 29 ans. Puis les Ursulines ont été décloîtrées, ce qui a permis à Mme Lacoursière d'apprivoiser le monde civil et d'envisager des études universitaires de 2e cycle. Elle fut la première Québécoise à réussir la maîtrise en foresterie de l'Université Laval.
En 1969, on l'a invitée à mettre sur pied le Département de biologie et écologie de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Elle y a enseigné jusqu'en 2003 et y a longtemps mené des activités de recherche. Ces dernières se divisaient en deux grandes parties : la protection de l'environnement (notamment les milieux aquatiques, comme le Saint-Laurent) et la distribution des plantes propres à la région trifluvienne. Mme Lacoursière a aussi catalogué des espèces végétales au compte de l'herbier du laboratoire de botanique de l'Université, dont elle a veillé à la réalisation. Sous sa direction, cet herbier a atteint les 20 000 espèces et a été baptisé herbier Estelle-Lacoursière en 2012.
Du reste, elle a fait reconnaître, comme emblème floral de Trois-Rivières, une plante à fleurs rare et vulnérable qui pousse de manière concentrée dans cette ville et ses alentours : l'aster à feuilles de linaire, qui figure d'ailleurs dans les armoiries de l'Université.
Mme Lacoursière était coauteure d'une quinzaine de publications. La plupart décrivaient les milieux naturels québécois avec une visée manifeste de préservation. Parmi ses publications qui ont connu des réimpressions, il y a lieu de mentionner L'herbier médicinal : album d'ethnobotanique québécoise (1983), L'érablière apprivoisée (1996), le tome 1 de Fleurs sauvages du Québec (1998) ainsi que trois manuels scolaires pour le primaire, soit L'arbrier québécois (1981), L'herbier québécois (1982) et Étang, un milieu de vie (1989).
Militante écologiste à la défense de la biodiversité, elle a présidé le Groupe d'éducation relative à l'environnement. Elle a également fait partie du comité scientifique du bulletin Franc-Vert de l'Union québécoise pour la conservation de la nature et a rédigé des chroniques d'information et d'action environnementales pour les journaux. Par ailleurs, elle a été membre du conseil d'administration de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour en vue de préserver au mieux la nature en zone industrielle. Partisane de la culture technoscientifique, elle faisait la promotion active du loisir scientifique auprès des jeunes et s'investissait dans l'organisation d'activités en ce domaine.
En 2010, la Ville de Trois-Rivières a nommé en son honneur un parc décrit comme étant un milieu humide éducatif, situé près du pont Laviolette qui, en enjambant le Saint-Laurent, relie Trois-Rivières à Bécancour. En 2019, à l'âge de 84 ans, la sœur révérende reçut un doctorat honoris causa de l'Université du Québec à Trois-Rivières pour ses efforts soutenus de vulgarisation scientifique et d'éveil de la conscience environnementale du public.
Vidéo
Recherche dans le site